Santé. Le casse-tête de la sécu à la fin des études

Nombreux sont les jeunes qui se retrouvent plusieurs mois sans couverture sociale avant de retrouver le régime général. Pour Mathias, 27 ans, cela a été fatal.

Matthias, diabétique, a dû batailler un an pour réintégrer le régime général. Il est mort à 27 ans, quinze jours avant que sa carte Vitale ne soir réactivée.
Matthias, diabétique, a dû batailler un an pour réintégrer le régime général. Il est mort à 27 ans, quinze jours avant que sa carte Vitale ne soir réactivée.

    En ce début d'été, des milliers d’étudiants s’apprêtent à entrer dans la vie active. Or le passage de la Sécurité sociale étudiante au régime général est loin d’être une promenade de santé. Sur les forums, ils sont nombreux à témoigner de leurs difficultés à rejoindre la Sécu classique.

    Ce régime spécifique , datant de 1948, a été délégué à deux mutuelles étudiantes. D’un côté la LMDE (la Mutuelle des étudiants) mise sous administration provisoire lundi pour cause de difficultés financières. De l’autre dix mutuelles régionales, fédérées par le réseau EmeVia (ex-Union nationale des mutuelles étudiantes régionales). Toutes deux gèrent ainsi les remboursements de la Sécurité sociale aux étudiants.

    Le changement de statut n’est pas automatique

    « J'ai quitté l'université mais n'ayant pas été informée, j'ai pensé que le changement était automatique. Ce qui n'est pas le cas. Depuis, j'ai travaillé et me suis inscrite à Pôle emploi. Je suis restée six mois sans couverture sociale », déplore Emma. Du côté du ministère de la Santé, on reconnaît les couacs lors de la réaffiliation des étudiants au régime général. Ils sont 360 000 chaque année. « La durée d'affiliation au régime étudiant étant brève, les organismes gérant le Régime étudiant de la Sécurité sociale (RESS) connaissent un taux de rotation de leurs fichiers de l'ordre de 34 % par an. Ce taux entraîne des difficultés lors de l'inscription des nouveaux étudiants, mais aussi à la sortie car les processus d'affiliation/désaffiliation sont fortement sollicités, explique le ministère. Par ailleurs, il apparaît que les ex-étudiants tardent souvent à effectuer les démarches. » Le gouvernement souhaite lever ces difficultés et annonce « que des réflexions visant à simplifier les règles d'affiliation ou de délivrance des cartes Vitale pourraient être engagées. »

    « Les démarches ne sont pas toujours compréhensibles

    , admet Anouch Zaroukian, trésorière de la LMDE. Nous mettons en place des actions pour les étudiants en fin de cursus et notamment l’envoi d’un courrier pour les informer. »

    Pour éviter ces va-et-vient, des voix prônent la suppression de la Sécu étudiante et le maintien du régime général.

    C’est ce que réclamait d’ailleurs en janvier la pétition de l’association de consommateurs UFC-Que choisir et l’association d’étudiants de la Fage (Fédération des associations générales étudiantes).

    Mathias, diabétique, est mort faute de carte Vitale

    Cette carte verte, symbole de notre statut d’assuré social, était bel et bien vitale pour Mathias.

    A la fin de ses études, ce jeune homme de 27 ans, qui devait réintégrer le régime général de la Sécurité sociale, a dû faire face à un imbroglio administratif qui lui aura été fatal. Diabétique depuis l’âge de 4 ans, Mathias est décédé faute de traitement suffisant, quinze jours avant que sa carte Vitale ne soit réactivée. C’était dans la nuit du 16 au 17 février, dans son appartement de Normandie. Entre-temps, il se sera battu pendant plus d’un an pour prétendre à une prise en charge à la hauteur de sa maladie et au remboursement de ses soins, en vain.

    Aujourd'hui, sa mère, Véronique, a ouvert un blog pour recueillir les témoignages de jeunes qui, eux aussi, se sont retrouvés plusieurs mois sans couverture sociale après avoir quitté leur Sécurité sociale étudiante => Pourmathiasunecarteetaitvitale.com. Une enquête est également menée par le pôle santé du Défenseur des droits.

    Dysfonctionnements de la CPAM locale ? De l’hôpital où il était suivi ? Des deux ?

    A l’issue des conclusions, cette maman n’exclut pas d’engager une procédure judiciaire « pour que chacun soit mis face à ses responsabilités ». On ne saura pas le nom de la ville où Mathias s’était installé « pour ne pas entraver les investigations », justifie Véronique, qui est parisienne. « Il ne s’agit pas de tirer à boulets rouges sur la Sécurité sociale ni de remettre en cause la qualité des soins en France, mais d’informer pour montrer à quel point l’incohérence et la lourdeur de l’administration, le manque de communication entre les acteurs des services pour les assurés sociaux peuvent avoir des conséquences dramatiques. »

    En septembre 2012, Mathias arrête ses études. Il veut travailler et s’installe dans une autre région. Sa Sécu étudiante prend fin en janvier 2013

    . Avec les soucis du déménagement, il ne pense pas à faire les démarches pour réintégrer le régime général. Il s’en rend compte fin janvier à la pharmacie, lorsqu’il veut obtenir son insuline. Il devra la payer comme de nombreuses autres boîtes. Soit environ 200 € par mois. Il dépose donc dans la foulée un dossier à la CPAM locale, pas de retour. Là-bas, on lui dit même qu’il n’est plus diabétique puisqu’il n’y a pas de trace de sa présence dans les fichiers. Il était pourtant pris en charge à 100 % depuis toujours et n’avait jamais eu à se soucier de quoi que ce soit pour ses soins quotidiens. Boursier, il bénéficiait, pendant ses études, d’une CMU (couverture maladie universelle). Au centre d’action sociale, on lui remet un passe santé afin de pouvoir être reçu gratuitement à l’hôpital. Mais la situation n’est pas débloquée pour autant. Il y est accueilli par un médecin qui lui délivre son insuline, mais jamais par un diabétologue. Pas de surveillance donc des yeux, des artères, du cœur… Tout ce que le diabète peut abîmer. On retrouvera son corps inanimé à côté d’une faible dose d’insuline. Son médecin était en vacances. « Mathias pensait pouvoir tenir le week-end en surveillant son alimentation et se rendre aux urgences si jamais ça n’allait pas, raconte sa mère. Se sentant mal, il s’est allongé mais ne s’est jamais réveillé ».

    Christine Mateus

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